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La marche de la Honte

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La marche de la Honte Empty La marche de la Honte

Message par Gennaker Dim 22 Mai - 14:16

C'est un épisode méconnu mais qui ressurgit dans les Mémoires de ceux qui l'ont subi, Bob Bearden (H/507) ou Joe Beyrle (I/506). Le défilé de la honte, vers la fin juin 1944, en plein Paris, depuis l'Arc de Triomphe, de centaines de POWs Alliés, américains et anglais, dont beaucoup de paratroopers, exhibés en loques, exténués et affamés, sous les objectifs des caméras de la propagande nazie, au milieu d'une foule parisienne haineuse criant et crachant sa vindicte. Bearden et Beyrle en ont été traumatisé, ne comprenant pas une telle haine.
James "Jimmy" J Sheeran, lui aussi de I company 506, est fait prisonnier dès les premières heures du D Day. Il a tout juste 19 ans. Comme des dizaines d'autres troopers, il va connaitre l'horreur de la condition de POW en Normandie ; marches épuisantes sans eau ni nourriture, pieds nus sur les chemins de pierre car les allemands leur ont enlevé leurs bottes. Les transferts par camion sont épouvantables, car les P 47 reignent en maître dans le ciel normand, et attaquent impitoyablement tout véhicule. Les gardes allemands plongent à l'abri dans les fossés, mais obligent les POWs à demeurer dans les camions. C'est le carnage, reproduit plusieurs fois par jour, des calibre 50 qui fauchent les prisonniers impuissants. Puis c'est Saint Lô et "starvation hill". Un enclos dans lequel, durant près d'une semaine, les troopers vont demeurer sans la moindre nourriture. Les allemands les font pourtant bosser, à dégager les bombes non explosées autour de la gare de saint Lô, puis d'Alençon. Exténués, souvent démoralisés, ils arrivent ainsi maigres et affaiblis à Paris, où la propagande du Reich les attend pour cette honteuse mise en scène. Récit de Jimmy Sheeran, dont la mère française avait épousé son père américain suite à leur rencontre en Lorraine durant la première guerre mondiale. ;

"Les boulevards de Paris étaient bondés de collabos et de leurs épouses, d'officiers allemands et de leurs maîtresses. Tout au long du parcours, des caméras suivaient les silhouettes décharnés des américains. Nous étions filmés pour les besoins de la propagande. Le choix du lieu remplissait trois objectifs : embarrasser les Français, remonter le moral des Allemands, et donner l'impression que les Français supportaient les forces de l'Axe. Mon esprit tournait en surmultiplié ; "Les Français aimaient ils les allemands?" Je me méprisai immédiatement pour avoir laissé une telle pensée m'envahir un instant. J'en déduis que la faim, l'épuisement et le stress avait bouzillé mes capacités à penser rationellement. Les cameras tournaient. Bien vêtus, des soldats d'élite allemands marchaient en cadence le long des boulevards, fusils à bout de bras. Ils avaient l'air forts et en bonne santé, et donnaient l'impression de maîtriser la situation. C'est sûr, ils nous maîtrisaient nous, les POWs.

Je faisais partie des premiers rangs de la marche. Je regardai autour de moi, me demandant quelle attitude prendre. Mais que pouvais je faire? Je me jurai de conserver une attitude droite et digne, tête droite, et de montrer de la force durant toute cette mascarade. Je voulais donner l'image d'un américain plein de confiance et d'assurance. Et je sais que tous les autres POWs partageaient mes sentiments. Je n'arrêtais pas de me demander ; " Que puis je faire pour leur montrer que je n'ai pas peur?"

Mais à ce moment là, il m'était impossible de donner une autre image que celle d'un pauvre gars sans espoir. J'étais d'une saleté repoussante, faible et émacié. Mon monde avait volé en éclat. C'était le moment le plus désespéré de ma vie.

J'ai concentré mes pensées sur mon sergent, Lud Engelbrecht. De toutes les personnes que j'ai rencontrées à l'armée, lui seul était capable de montrer du défi à l'ennemi hurlant. Il était toujours dans mes pensées. J'essayais souvent d'imaginer comment il aurait réagi dans telle ou telle situation. Je me remémorai à cet instant notre escapade de Camp Shnaks, New York, deux jours avant notre départ pour l'Angleterre. On a fait du stop jusque chez moi dans le New Jersey. J'avais présenté Lud à ma famille. D'emblée, papa avait aimé ce gars solide de Syracuse, NY. Je pense que d'avoir vu ce grand gars costaud a beaucoup aidé mes parents à accepter mon départ pour le front.

Je pensais à ma famille, et au fait que je me tenais au même endroit qu'eux il y a quelques années. Je pus ainsi me reconnecter à l'essence même de mon être, l'amour de ma famille, et leur amour pour moi. C'est là que se trouvait ma véritable force. Ces rues avaient existé avant l'invasion nazie, et elles demeureraient après qu'ils aient été vaincus. J'avais faim, certes, mais ce n'était qu'une situation temporaire. Je mangerai de nouveau, à satiété. J'étais là comme un prisonnier, mais dans mon coeur, je savais que je redeviendrai libre. Tout ce que j'endurai n'était que provisoire. Ce qui était réel et immuable, était l'amour de ma famille.

J'ai senti alors papa et maman à mes côtés, me soutenant et m'aidant à me tenir debout. Je sentais la famille française de maman à mes côtés, une famille dont je foulais la terre. Leurs mains me poussaient dans le dos, et m'aidaient à avancer. Leurs voix me disaient "You can do it Jimmy!". Ces voix noyèrent tout le vacarme et les cris de haine autour de moi. Grâce à elles, je pus marcher droit et le regard fier.

Je regardai droit dans les yeux les officiers allemands et leurs maîtresses. En passant devant eux, je souriais. J'entendais la voix de Lud ; "Observe autour de toi Jimmy ; ne les laisse pas te baiser!"

La foule avançait en même temps que nous. Il n'y en avait pas des milliers. C'était une petite foule de collabos rassemblée par les allemands pour nous cracher dessus devant les caméras. Mais au delà des rangs des collabos, je voyais les vrais français. Ils regardaient depuis un mur une centaine de mètres en retrait. Ils nous faisaient des signes, levaient la main avec le V de la victoire. Ca m'a galvanisé!

J'ai continué d'avancer avec un sourire de défiance. En approchant d'un opérateur de caméra, et d'un groupe de collabos vociférant, j'ai remarqué une jeune femme d'une vingtaine d'années et qui me regardait en échangeant avec l'opérateur de la caméra. Elle fit un geste d'approbation en me montrant du doigt.

J'ai compris qu'elle allait me cracher à la figure.

Une opportunité se présentait à moi, et je su exactement ce que j'allais faire.
Toute en approchant, j'ai rassemblé tout ce que j'avais de salive. La jeune femme s'est extraite de la foule et a bondit vers moi. Le caméraman la suivait comme son ombre. J'étais prêt. Elle fit exactement ce que j'attendais ; elle me cracha en plein visage. Et je lui ai tout balancé dans la gueule!

Un soldat est sorti du rang en gueulant comme un fou. En passant devant une autre caméra, un soldat a aggripé son fusil par le canon, comme une batte de base ball, et m'a frappé violemment. Le coup m'a touché au creux des reins et m'a projeté au sol. J'entendais la foule qui riait et applaudissait. Les larmes me montèrent aux yeux, mais je refusais de prendre l'air abattu. Je refusais de montrer la douleur ou la peur. Je me suis relevé et j'ai souri. J'ai repris ma marche, et j'ai jeté un regard en arrière vers le mur où se trouvaient les français. Leur enthousiasme m'a rappelé la gloire de mes années de football. Je venais de marquer un touch down!"

Les images d'archives INA
http://www.ina.fr/video/VDF07000861/prisonniers-anglo-americains.fr.html
Gennaker
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Message par Admin carwood Dim 9 Oct - 7:22

merci pour ce reportage qui est édifiant sur les français qui avais choisi leurs camp
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